Le Canada aide d’autres démocraties en partageant ses talents judiciaires

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mercredi, 10 avril 2024
Publié dans Dernières nouvelles

Ce billet fait partie d’une série de blogues sur les «décisions de la CSC et plus encore» rédigés par notre collaborateur James Hendry. Pour lire les autres billets, cliquez ici.

Texte original en anglais


Le Canada aide d’autres démocraties en partageant ses talents judiciaires

L’État de droit est souvent décrit comme la règle des lois et non des individus. Dans le tumulte des débats sur cette description simpliste, quelques idées de base sont communément admises. La vie sociale et commerciale doit être ordonnée par des règles positives édictées par des assemblées au nom des membres de la communauté. Des juges impartiaux, au sein d’un pouvoir judiciaire indépendant, doivent trancher les litiges portant sur le respect, par les personnes physiques ou morales de la communauté, des règles utilisées pour régir la conduite individuelle, par exemple dans les affaires, ou des règles régissant tous les membres de la communauté, par exemple le droit criminel.

Je pense que le Canada dispose d’un pouvoir judiciaire fort, impartial et indépendant et qu’il peut envoyer un message fort sur le rôle du pouvoir judiciaire dans la réalisation de l’État de droit. Nos juges eux-mêmes ont interprété la Constitution pour développer des règles et des institutions afin de maintenir la perception publique de leur impartialité, individuellement et institutionnellement. Par exemple, la CSC a déterminé que la Constitution exigeait qu’un commissariat s’interpose entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir exécutif afin de dépolitiser la rémunération des juges. Cette situation contraste avec celle de nos voisins du sud, où le public a l’impression que la Cour suprême actuelle est composée d’une majorité conservatrice et d’une minorité libérale. Par conséquent, la magistrature canadienne peut conseiller les juges d’autres pays sur la manière de développer et de maintenir une magistrature forte et impartiale. Lorsque nous pouvons aider, nous devons le faire. Plus il y aura de démocratie dans le monde, mieux ce sera.

Il semble logique et approprié que le Canada offre ses conseils judiciaires aux juges d’autres pays qui en expriment le besoin dans un monde globalisé où l’état de droit a besoin d’être renforcé. Affaires mondiales Canada a conclu un accord administratif, le Projet de partenariat d’assistance technique, avec le Commissariat à la magistrature fédérale, afin d’aider chaque année quelques pays à renforcer la confiance du public dans leur système judiciaire. L’assistance technique judiciaire proposée dans le cadre du Projet vise à contribuer à l’efficacité, à l’ouverture et à la responsabilité du système judiciaire d’un partenaire et est bien entendu soigneusement négociée avec le pouvoir judiciaire de ce pays. Le Commissariat garde un œil sur la participation des juges canadiens afin de ne pas entacher leur impartialité. Le Projet vise à contribuer aux objectifs de développement international du Canada en favorisant une gouvernance inclusive, comme nous nous y sommes engagés dans notre Politique d’aide internationale féministe et nos Objectifs de développement durable, ainsi qu’à l’engagement bien connu du Canada en faveur des droits de la personne. Le Commissariat a conclu une entente avec l’Institut canadien d’administration de la justice qui héberge ce blogue, pour les communications relatives au Projet.

Les discussions entre juges sur des problèmes communs créent un climat de confiance entre les magistrats. Les juges canadiens apprennent beaucoup de choses qu’ils peuvent transmettre à leurs collègues.

Un projet de partenariat d’assistance technique a récemment été mis en œuvre en Mongolie.

En ce qui concerne les relations internationales, le Canada a récemment établi des liens diplomatiques avec la Mongolie. La Mongolie est située entre la Russie et la Chine, mais elle a développé des relations politiques, économiques et de défense avec les démocraties occidentales, dont le Canada. Le Canada et la Mongolie partagent des intérêts économiques liés à l’exploitation minière et au climat. Les deux pays ont signé un accord d’aide bilatérale au développement en septembre 2016, pour soutenir l’objectif de la Mongolie de devenir un pays à revenu intermédiaire d’ici 2030. La coopération économique et le développement nécessitent un système judiciaire solide. Les investisseurs et les gens d’affaires ont besoin de savoir que leurs différends juridiques seront résolus par des juges impartiaux qui appliquent des règles de droit connues et comprises. L’État de droit exige que tous les litiges, qu’ils soient commerciaux ou domestiques, soient résolus de la même manière impartiale.

La corruption peut éroder la confiance dans les juges et saper non seulement la qualité de leurs décisions, mais aussi la perception qu’a le public de la manière dont leurs différends seront résolus. La Mongolie, comme d’autres pays, est confrontée à ce type de corrosion. La déontologie judiciaire a été l’un des points forts des récents travaux des juges canadiens avec la magistrature mongolienne cette année. Le juge en chef du Nouveau-Brunswick, Marc Richard, a participé très activement à l’élaboration d’un guide de déontologie à l’intention des juges de la Mongolie et à la création d’un comité consultatif sur la déontologie judiciaire. Le juge en chef Richard s’est engagé avec les membres du comité à réfléchir à la manière de faire connaître ces ressources aux juges et à la manière de les conseiller quant à l’application du guide dans des situations spécifiques.

Ils ont exploré les moyens de créer un ensemble utile d’interprétations pour guider le comportement des juges à l’avenir, y compris les questions de protection de la vie privée et la nécessité de fournir des conseils prospectifs aux collègues plutôt que des commentaires sur le comportement passé qui pourraient être présentés au comité de discipline. Il est important de noter qu’ils ont discuté de la manière dont le reste de la magistrature pourrait être formée par les membres du comité d’éthique aux principes éthiques adoptés. Cette démarche a permis de diffuser la vision canadienne de la manière dont les juges devraient se comporter pour améliorer la confiance générale du public dans le système judiciaire et les raisons pour lesquelles les gens peuvent se fier à leurs décisions. La juge Mary Moreau, aujourd’hui juge à la Cour suprême du Canada, a travaillé sur les questions d’indépendance judiciaire avec les juges de la Mongolie. Elle a également travaillé avec eux sur la tâche vitale d’assurer une communication utile avec le public desservi par les juges. Elle a parlé de la qualité réciproque de ces réunions résultant de sa participation à ce projet.

Les Canadiens s’enorgueillissent d’être les champions des droits de la personne au niveau national et international. Nous devons saisir les occasions qui nous sont offertes de démontrer cet engagement. Notre système judiciaire est une ressource importante à partager avec les pays qui sont en train de développer le leur.

***Ceci ne constitue en aucun cas un avis juridique

À propos de l'auteur

James Hendry

James Hendry

James Hendry was called to the Ontario Bar in 1981. He was in private practice until 1984 when he joined the Canadian Human Rights Commission as counsel providing legal advice and litigation services, appearing at all levels of court, including the Supreme Court of Canada. In 1989, he was recruited by the Department of Justice. He was General Counsel in the Human Rights Law Section until 2011, specializing in civil Charter social policy advice and equality rights, and interpreting and designing human rights legislation. He was Research Director with the Canadian Human Rights Act Review Panel and a Visiting Scholar at Harvard Law School on a Canada-U.S. Fulbright Scholarship. He publishes extensively on Canadian and comparative constitutional issues and has lectured in Canada, Spain, South Africa, the United States, and Hong Kong. He taught Constitutional Law and Charter at the University of Ottawa, Faculty of Law and currently co-teaches a course on “Writing for Social Justice.” He designed and presented lecture series on the Charter, International Human Rights and Aboriginal Rights at Carleton University. He was the Editor in Chief of the Federated Press Charter and Human Rights Litigation journal from 1993 to 2016. He was founding Editor in Chief of the PKI Global Justice Journal, now published by Queen’s Law (2017 to 2022).