Découvrez notre conseil d’administration : l’honorable juge Julie Dutil

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mercredi, 27 octobre 2021
Publié dans Dernières nouvelles

Depuis sa création en 1974, l’ICAJ s’emploie à promouvoir une saine administration de la justice ainsi qu’à soutenir la communauté juridique de toutes les manières possibles. L’ICAJ tient à remercier les membres de son conseil d’administration, qui partagent leurs compétences et œuvrent à l’amélioration du système de justice avec cœur et intelligence, au bénéfice de la société tout entière. Les actions et programmes de l’ICAJ ne seraient pas possibles sans le dévouement de ces professionnels remarquables.

 

Que représente l’ICAJ pour vous ? 

L’ICAJ est une importante organisation qui fait la promotion de l’excellence en offrant des formations dans les différents domaines du droit. Ce qui est très intéressant, c’est que ses membres proviennent de différents horizons liés au système de justice. On y retrouve des juges, des avocats, des professeurs et des étudiants. Cela permet des échanges forts intéressants et constructifs.

Je suis membre du conseil d’administration depuis 2018, mais je participe aux activités de l’ICAJ depuis de nombreuses années. Il n’est pas facile de choisir un événement marquant en particulier, car il y en a plusieurs. Toutefois, un de ceux-là était certainement le colloque organisé en 2018 par l’ICAJ pour souligner le XXe anniversaire de la médiation judiciaire. Il s’est tenu à l’Édifice Ernest-Cormier, à Montréal, où siège la Cour d’appel. J’étais une des conférencières parmi d’autres. Nous avons eu un portrait de la médiation partout au pays, dans les différentes instances. En outre, plusieurs conférenciers internationaux nous ont permis de porter « un regard planétaire sur la médiation de l’avenir ». C’est au Québec que ce modèle de médiation a pris naissance et cela a eu une influence ailleurs dans le monde. Des magistrats européens et africains assistaient au colloque. L’ICAJ a donc un rayonnement international et est à l’affût des développements dans le monde juridique. L’ICAJ continuera à développer un réseau international au cours des prochaines années afin de faire mieux connaître sa grande expertise en matière de formation.

Pourquoi est-ce important pour vous d’être actif et de vous impliquer en marge de votre fonction ?

Je me suis toujours impliquée dans mon milieu aux différentes étapes de ma vie et de ma carrière. J’aime bien être dans l’action ! En outre, je trouve cela très important, non seulement pour enrichir mes connaissances juridiques, mais aussi pour rencontrer d’autres juges, des avocats et des universitaires. Le droit est un domaine en constante évolution et il nous faut être à l’affût des nouveaux développements. Les colloques et séminaires sont très utiles à cet égard. Par ailleurs, le travail d’un juge peut parfois être assez solitaire. Participer à des colloques et des séminaires, ou encore être membre d’associations, permet de se socialiser avec des collègues, tout en élargissant nos connaissances.

Qu’est-ce que vous aimez le plus dans votre travail ?

J’ai toujours aimé le monde judiciaire. Dès mon jeune âge, j’étais fascinée par les procès que je voyais dans les films. Aujourd’hui, j’ai le privilège d’être juge. À la Cour d’appel, nous sommes trois à siéger sur une formation pour entendre les pourvois. C’est vraiment intéressant d’écouter les avocats présenter leur cause et ensuite d’en discuter avec les deux autres collègues de la formation. C’est formidable de pouvoir échanger sur des questions qui sont souvent difficiles. Lorsque l’audition est terminée, il faut ensuite rédiger une décision et trouver la meilleure solution au problème qui nous est soumis. C’est un autre aspect de mon travail que j’aime vraiment.

Y a-t-il une cause qui vous tient davantage à cœur ?

Je trouve qu’il faut faire tous les efforts nécessaires pour protéger la société de droit. Nous avons une chance immense, au Canada, de vivre dans une société démocratique aux institutions fortes. Les tribunaux sont à la base de cette démocratie. Sans la règle de droit et des tribunaux indépendants, il n’y a pas de démocratie et de liberté.

Pensez-vous que la justice évolue avec la société ?

La justice évolue avec la société, mais les décisions des tribunaux peuvent aussi faire évoluer la société. Par exemple, en 1928, la Cour suprême du Canada, dans la cause « Personne » ou « Persons case », a décidé que les femmes n’étaient pas des personnes au sens de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique. Heureusement, à cette époque, il y avait un appel au Conseil privé à Londres. Les Lords anglais ont infirmé cette décision et conclu que les femmes étaient des personnes ! (Edwards v. A.G. of Canada [1930] A.C., 1929 U.K.P.C.86.)

Êtes-vous présente sur les médias sociaux ?

Je suis présente sur les réseaux sociaux, mais d’une façon très discrète et différente de la plupart des gens. Comme juge, je pense qu’il est nécessaire de demeurer de son temps afin de comprendre ce qui se passe dans la société. Les juges ont toujours eu un devoir de réserve et doivent éviter d’intervenir dans les débats de société, car ils sont appelés à trancher les litiges qui peuvent survenir. Toutefois, cela n’empêche pas un juge de suivre ce qui se passe dans la société et, de nos jours, les réseaux sociaux sont devenus un moyen de communication incontournable ainsi qu’un lieu d’échanges. Pour ma part, je ne fais jamais de commentaires sur les réseaux sociaux, j’ai un nombre d’amis limité et mes paramètres de sécurité sont stricts. Toutefois, je peux suivre ce qui se passe et ainsi mieux comprendre le monde dans lequel on vit.

Avez-vous une référence/influence/modèle dans ce milieu ? Pourquoi ?

Une des personnalités du monde juridique que j’admire le plus est l’ancienne juge en chef du Canada, l’honorable Beverly McLachlin. Non seulement c’est une juriste remarquable, mais elle a su rester authentique et passionnée de justice tout au long de sa longue carrière. Elle a par ailleurs dirigé la Cour suprême avec beaucoup de doigté et de classe.

Quel est le plus grand défi auquel vous avez fait face dans votre parcours ?

Comme plusieurs femmes, ce fut la conciliation travail-famille. J’ai une fille qui est née alors que je pratiquais le droit depuis 10 ans et que je plaidais partout au Québec, plusieurs fois semaine. Mon mari, pour sa part, voyageait à l’international sur une base régulière pour son travail. J’ai toutefois eu la chance de pouvoir compter sur une jeune femme responsable qui demeurait à la maison et s’occupait de ma fille les premières années. Quand j’ai été nommée juge, ma fille avait 5 ½ ans. Mes horaires sont devenus plus prévisibles et me permettaient de mieux planifier. Le juge en chef associé de l’époque a offert d’aménager mon horaire et mes déplacements de façon à faciliter cette conciliation. Ce fut très apprécié !

Lorsque vous avez choisi d’étudier le droit, pensiez-vous ensuite poursuivre une carrière de juge ?

Je n’ai jamais pensé qu’un jour je serais juge. Je voulais être avocate et plaider. Je trouvais que le travail de juge n’avait pas l’air très intéressant…Mon père m’en parlait à l’occasion, mais je ne démontrais pas un grand enthousiasme jusqu’à ce qu’une de mes associées soit nommée à la magistrature et qu’elle m’encourage à la suivre. Je n’ai jamais regretté de l’avoir fait.

Si vous n’étiez pas devenu juge qu’auriez-vous aimé faire d’autre ?

Je serais toujours avocate. Je ne vois pas d’autre domaine qui aurait pu me passionner autant, sauf peut-être une carrière internationale.

Avez-vous une activité ou un passe-temps favori ?

J’adore la marche et les randonnées en forêt.

Y a-t-il un message que vous aimeriez passer aux juristes de la nouvelle génération ? Si vous pouviez vous parler à vous-même quand vous aviez 20 ans, que vous diriez-vous ?

Il faut poursuivre son rêve, même si la route a parfois l’air d’être semée d’embûches. Lorsqu’on fait ce qu’on aime, on réussit !


À propos de l’honorable juge Julie Dutil

Présidente du Conseil d’administration de l’ICAJ
Juge à la Cour d’appel du Québec

L’honorable juge Julie Dutil est juge à la Cour d’appel du Québec. Admise au Barreau en 1980, elle a exercé sa profession au cabinet Grondin Poudrier, Bernier, principalement en droit du travail. Elle a été membre de plusieurs comités du Barreau du Québec. En mai 1995, elle fut nommée membre à temps partiel de la Commission des plaintes des citoyens contre la Gendarmerie Royale du Canada. La juge Dutil a été nommée juge à la Cour supérieure le 8 novembre 1996 et, le 24 septembre 2004, à la Cour d’appel. Elle a été juge coordonnatrice de la Cour d’appel à Québec. La juge Dutil a été présidente de l’Association canadienne des juges des cours supérieures (ACJCS). Elle a siégé au conseil d’administration et a été membre du Bureau de direction. Elle a été déléguée par l’ACJCS à l’Union internationale des magistrats dont elle fut présidente de la Commission d’étude sur le droit public et droit social de même que première vice-présidente du groupe régional ANAO. Elle a été présidente de la Conférence des juges des cours supérieures du Québec et membre du conseil d’administration. Elle a siégé au conseil d’administration du Chapitre canadien de l’Association internationale des femmes juges. En outre, la juge Dutil siège depuis plusieurs années au comité directeur du Fonds d’enseignement et de recherche de la Faculté de droit de l’Université Laval. La juge Dutil a été conférencière invitée dans des universités et pour d’autres organisations au Canada, en France, à Malte, au Sénégal, en Australie et au Brésil. Elle est membre du conseil d’administration de l’Institut canadien d’administration de la justice depuis 2018 et en est l’actuelle résidente (depuis octobre 2023).

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À propos de l'auteur

ICAJ

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Fondé en 1974, l’Institut canadien d’administration de la justice (ICAJ) rassemble les individus et les institutions au service de l’administration de la justice et vise à promouvoir l’excellence en favorisant l’acquisition de connaissances, la formation et l’échange d’idées. L’ICAJ offre de la formation sur mesure et des programmes multidisciplinaires conçus pour tous les acteurs du système de justice, rédige des rapports et émet des recommandations pouvant servir d’assise au changement.